Nous avons passé le mois de juillet en Sicile et en Calabre deux belles régions au sud de l'Italie. On vous raconte ce qu'on a vu !


Ciao ragazzi ! Da dove vinite ?


- Ciao ragazzi ! Vous venez d'où ?

- On pédale depuis Paris !

- Depuis Paris ? Non ! Pas possible ! Tout en vélo ?

- Oui tout en vélo.

- Ça en fait du chemin ! Pourquoi est ce que vous passez par ce coin perdu ? Vous allez où ?

- On sait pas trop... on se promène.

- Vous faites le tour d'Italie ?

- Non, le tour du monde. Après on va en Grèce en Turquie, en Égypte, en Iran... on voyage pendant un an.

- C'est génial ! Venez prendre un verre, vous allez nous raconter ça !


Avec nos vélos et nos sacoches nous ne passons pas inaperçus, surtout dans les petits villages, où assis sur la place, on consulte la carte, on déjeune ou on se repose. C'était un peu le cas en France, en Suisse et en Émilie-Romagne, mais en Sicile et en Calabre on nous aborde tout le temps. Cyclistes du dimanche, des vieux sur un banc de la place du village ou au café, dames devant l'épicerie, un passant en scooter, toutes ces personnes nous abordent avec curiosité et sympathie.


Souvent notre interlocuteur nous recommande d'aller visiter telle ou telle attraction touristique, une plage, un monument, une ville plus loin. Ces lieux touristiques nous déplaisent car nous y redevenons des touristes anonymes. On préfère les petits villages où nous sommes les voyageurs à accueillir. Parfois on nous indique un bon coin pour déjeuner, ou pour planter la tente.



Rapidement tout le village est au courant de notre présence et le francophone du village - il a un cousin français ou il a vécu en France pendant plusieurs années - se fait un plaisir de venir discuter avec nous. Plusieurs fois, on est invités à boire un coup, parfois on nous donne des provisions, on a pris soin de nous.


Dechetsption


L'automobiliste circulant en Sicile et en Calabre ne voit pas les déchets qui jonchent les bords de la route car il va trop vite. Il ne les verra pas non plus s'il se gare sur les places de parkings des hôtels, des centres commerciaux, ou des centres villes touristiques. En restant dans les centres villes, sur les plages privées ou dans une réserve naturelle, en évitant les quartiers populaires et les plages gratuites, il ne les verra pas plus.



En vélo, on les a vu parce qu'on va lentement, qu'on passe par les banlieues pour aller dans les centres villes et qu'on ne va pas à l'hôtel. Des bouteilles plastiques, des canettes, des emballages, des vieilles chaussures, des canapés et de l'électroménager, et d'autres trucs, moins nombreux sont là depuis trop longtemps pour qu'on puisse en deviner l'origine. On a vu beaucoup de dépôts sauvages autant dans la nature que dans les quartiers (très) pauvres. Des tas de sacs poubelles entourés de vieux déchets échappés d'un sac éventré. Ça ne sent pas très bon, surtout sous la chaleur du mois de juillet.


Des déchets et des dépôts sauvages, il y en a aussi sans doute en France, et aussi au nord de l'Italie où on a voyagé, mais il y en a moins qu'en Sicile et en Calabre où on se réjouissait de trouver un coin de nature sans déchet. Les coins touristiques en sont dénués mais les endroits pauvres ou vides comme un rond point en sont pleins.


En discutant avec nos hôtes, on a pas réussi à savoir pourquoi la filière de collecte et traitement des déchets est si défaillante. On osait pas trop leur dire qu'on trouvait tous ces déchets très sales.


Ces déchets, s'ils ne sont pas brûlées finiront sans doute dans la mer. Pauvre chaussure abandonnée, petite bouteille en plastique brunie par le soleil et le temps, réjouissez vous car voilà que vous glissez inexorablement vers votre destin, la mer, votre destination le Pacifique, votre terre promise, le continent de plastique. Vous n'y arrivez sans doute pas entier mais vous y arriverez. En tout cas, vous arriverez avant nous.


La promenade de Saint François de Paul


Le dimanche 25 juillet est un jour spécial à Lago, petit village à mi chemin entre le col et la mer : c'est le jour de la procession de Saint François de Paul. Nous avons eu l'heureux hasard d'y passer ce jour là.


Après avoir grimpé depuis la plage toute la matinée, nous nous asseyons sur les marches devant une petite église donnant sur une place pittoresque d'un village de basse montagne. Comme nous sommes dimanche, nous demandons à une dame qui sort alors de l'église s'il y a une messe l'après midi. Sa réponse, dit en italien beaucoup trop rapide pour que nous en comprenions tous les détails, nous indique qu'il y a une évènement à 18h et qu'après il y aura une messe. Nous complétons en déchiffrant une affiche qui porte en gros la date du jour, ce qui a attiré notre attention. À 18h la statue de Saint François de Paul sera portée en procession dans le village. Réjouis d'assister à un tel évènement, nous nous souvenons alors les paroles d'une hôte allemande en Sicile qui nous avait prévenu : "les italiens aiment promener leurs statues".


A l'heure prévue une petite foule accueille la statue du saint sur le parvis de l'église ainsi qu'une fanfare.



Après une prière adressée au saint, de nombreux baisés et caresses à la statue - malgré l'interdiction édictée en début de cérémonie de faire ces gestes en raison de l'épidémie - et une petite musique de fanfare laïque, la statue est placée dans un pick-up dans laquelle elle part faire le tour de la ville. Un homme en scooter, portant des lunettes de soleil bleu comme son casque rond, avec un sifflet et une chasuble mentionnant "assistente del traffico", mélange comique de Longtarin et Top gun, fait la circulation avec un plaisir visible. Les villageois attendent le convoit aux tournants, où la statue s'arrête pour écouter la fanfare.



Enfin, après une demi heure de promenade tout le monde se retrouve sur la grande place pour une messe en plein air - covid oblige - certains y assistant depuis la terrasse du café. Qui eu crut que cette épidémie eu réussi le miracle d'inclure dans la messe les mécréants du café ? Nous prenons plaisir à rester assis sur nos vélos pendant la messe, ce qui ne manque pas d'attirer des regards curieux.


Après la messe beaucoup de gens viennent nous parler. Quand on raconte notre histoire à une bande de gentilles vielles dames, elles s'exclament : "Bellissimo, siete bellissimo ! Che bella coppia !". On nous présente à monsieur le maire, de qui on obtient la gracieuse autorisation de planter la tente sur un pré municipal à la sortie du village.


La nuit tombée les villageois rassemblés sur la place assistent à un grand feu d'artifice. On nous invite encore à s'assoir prendre un verre, et finalement nous partons dormir dans le pré sous le regard protecteur de Saint François.